Plus vaste des provinces historiques bretonnes (les deux tiers du Finistère), largement échancrée de baies qui transposent au cœur des terres une atmosphère marine, la Cornouaille regroupe une mosaïque d’entités d’une grande diversité paysagère : au sud, la Basse Cornouaille, maritime, maraîchère, laitière (la vache locale, la pie-noire, se trouvant concurrencée par la frisonne et la normande), religieuse (innombrables croix et calvaires), touristique, s’allonge toute en longueur sur une centaine de kilomètres, de la pointe du Raz au village du Pouldu, alignant successivement d’ouest en est : le Cap-Sizun, le pays de Douarnenez, le Pays bigouden, le pays de Quimper, le Fouesnantais, le pays de Concarneau, le pays d’Aven et, enfin, le pays de Quimperlé. A cet ensemble, s’ajoutent les îles de Glénan. Au nord, la Haute Cornouaille offre un visage différent avec ses demi-montagnes et ses bassins (Porzay, pays de Châteaulin), avant de se terminer par la presqu’île de Crozon.
Le Cap-Sizun (ou Cap), extrémité occidentale de la Cornouaille, élance sa proue dans l’Océan, sculptée, au nord, par la baie de Douarnenez et, au sud, par la baie d’Audierne. La Pointe du Raz, grand site naturel breton, que prolonge, au large, l’île de Sein, apporte sa sauvagerie à une campagne densément peuplée où « pullulent » les petites maisons blanches.
Le pays de Douarnenez, tout entier tourné vers sa baie, fermée au nord par la presqu’île de Crozon, résonne encore de l’activité suscitée par un poisson bleu qui a fait son histoire : la sardine.
Le Pays bigouden, rendu célèbre par la haute coiffe que portait les femmes (devenue un emblème de la Bretagne), ainsi que par le roman de Pierre-Jakez Hélias, Le cheval d’orgueil, groupe 25 communes le long de l’ample baie d’Audierne et jusqu’à Pont l’Abbé, sa capitale. Les origines ethniques obscures de cette communauté, longtemps repliée sur ses traditions et dont la foi prend toute sa dimension lors de pardons qui attirent la foule, suscitent d’intenses émotions. On ne revient jamais le même d’un voyage en Bigoudénie ! Si la baie d’Audierne aligne de jolies plages, l’arrière-pays présente des vallonnements légers et une végétation plus dense. La rivière de Pont l’Abbé, tournée vers l’ostréiculture et l’aquaculture, introduit une heureuse impression.
Le pays de Quimper correspond, lui, à une vingtaine de communes entourant la capitale de la Cornouaille et s’étirant jusqu’au Fouesnantais, encore bocager et connu pour son cidre. Quimper, célèbre pour sa faïence aux sujets peints naïfs, la fine dentelle de ses crêpes et de sa cathédrale, a su mettre son patrimoine médiéval en prise avec son temps.
Le pays de Concarneau, quant à lui, semble tout entier tourné vers sa capitale, premier port de pêche français, dont la ville close (îlot ceint de rempart) est remarquable. Remarquable aussi le pays d’Aven qui le jouxte, offrant une grande douceur de vivre et dont la capitale, Pont-Aven, éternisée par Paul Gauguin et célèbre pour ses biscuits, sert de havre aux touristes.
Le pays de Quimperlé, soumis à l’attraction lorientaise, présente une verdoyante campagne, riche en sites naturels romantiques, traversée par les splendides vallées de l’Ellé et de l’Isole. Le Pouldu, où se fixa le courant pictural dit « Ecole de Pont-Aven », autour de Gauguin, marque l’ultime avancée de la Cornouaille orientale.
Quant au Porzay, il s’agit d’une minuscule cuvette triangulaire (environ 70 km2) de plaines basses et schisteuses, blottie au fond de la baie de Douarnenez et délimitée par le chaînon du Menez-Hom, qui le sépare de la presqu’île de Crozon, et la montagne de Locronan, qui l’isole de la Basse Cornouaille. Cette situation génère une douceur climatique humide propice aux cultures et à l’élevage, ainsi qu’un isolement qui a favorisé la croyance religieuse, comme en témoignent les multiples chapelles et les processions d’une rare ferveur.
Le pays de Châteaulin occupe la partie occidentale du bassin du même nom (la partie orientale relevant du Poher voisin), enchâssé entre les monts d’Arrée et les Montagnes Noires. Traversé par les méandres de l’Aulne, ces molles croupes, réservées à une agriculture diversifiée (porcins, bovins, volailles, céréales, pomme de terre), se consacrèrent longtemps à l’élevage des chevaux.
Enfin, la presqu’île de Crozon, étrangement cruciforme en cette contrée finistérienne animée par la foi religieuse, s’allonge sur 25 kilomètres entre la baie de Douarnenez au sud et la rade de Brest au nord. Couverte en partie par la lande et de denses forêts, elle cumule les sites naturels protégés. La pêche, la langouste et le tourisme font vivre sa population.
La Cornouaille apparaît comme un véritable « pays de cocagne » par la variété de ses produits et la typicité de ses spécialités culinaires. Les productions légumières (carotte, chou pommé breton, pomme de terre primeur bretonne…), fruitières (pommes), l’élevage alimentent l’industrie agroalimentaire (pâté de porc Hénaff), surtout spécialisée autour du poisson (conserves de poisson) : sardine à l’huile, maquereau au vin blanc, thon blanc au naturel, thon à l’huile.
En haute saison, les ports de Concarneau, Douarnenez et du Guilvinec notamment accueillent et transforment des tonnes de poissons du large : lieu, congre, cabillaud, baudroie, merlu, rouget, bar de ligne, daurade, mulet, éperlan, plie, raie bouclée, aiguillette, sardine de bolinche, maquereau, thon blanc germon, anchois, sprat…), coquillages (moule, huîtres de Bretagne dont celle de Belon, palourde, praire, coque, amande de mer, bigorneau, couteau, bernique, coquille Saint-Jacques, oursin…) et crustacés (tourteau, araignée de mer, étrille, crevette, langoustine, langouste, homard bleu breton, pouce-pied…) ; poissons d’eau douce (truite, perche, brochet, saumon…).
Spécialités : moules marinières, cotriade, plateaux de fruits de mer, soupe à la tête de congre, daube de congre, lotte à l’armoricaine, raie bouclée au beurre noisette, quiche bretonne, pâté breton, rillettes bretonnes de porc, andouille fourrée au lard de Baye (voir à andouille de Guéméné) et andouillette, saucisson à l’ail, saucisse, chotten, lard rôti, rôti de porc au cidre, caillettes de Cornouaille (boulettes de chair à saucisse nappées d’une sauce piquante), graisse salée, lard pompé (rôti de porc injecté de sel, ce qui blanchit la viande à la cuisson), saucisse aux algues, boudin noir aux pommes de Rosporden, potée bretonne, ragoût bigouden, kig ha fars (avec son fars pod), tripes bretonnes, ragoût d’agneau et gigot d’agneau à la bretonne (agneau de pré-salé breton), poulet au cidre breton, pâté de cormoran, soupe au sarrasin, lait, lait ribot et gros lait, crème, beurre breton demi-sel, riz au lait à la bigoudène, bouillie d’avoine, pain monsic, pain noir et pain de seigle breton, pain recuit, pain doux bigouden, gâteau de pâte, crêpe bretonne, far breton, galette de Pleyben et galette de Pont-Aven (galette bretonne), crêpe dentelle, kouign amann, galette bretonne et palet breton, quatre-quarts, gâteau breton, miel de sarrasin, confitures artisanales. Jus de pommes, Breizh Cola (coca-cola breton !), cidre de Cornouaille et cidre de Fouesnant (cidre breton), pommeau de Bretagne, bière de Bretagne, whisky breton, pastis marin, lambig (eau-de-vie de cidre), chouchen (chouchen de Rosporden), liqueur de pomme, liqueur de fraise de Plougastel, liqueur de framboise.
Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.
A propos du membre
Frédéric Zégierman
Valence (26000)Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.