Vaste langue de terre, située entre les estuaires de la Loire, au sud, et de la Vilaine, au nord, et s’avançant en mer jusqu’au traict du Croisic, la presqu’île que commande Guérande regroupe cinq entités nettement différenciées : la bande littorale, semée de ports de pêche dynamiques et de stations balnéaires (dont l’impressionnante conurbation La Baule-Le Pouliguen) alanguies le long de leurs amples plages sableuses ; en retrait, le Pays paludier (« pays du sel ») correspondant à la zone des marais salants exploitée depuis le Moyen Âge ; plein sud, le pays nazairien qui allonge une longue bande côtière le long de l’estuaire de la Loire réalisant la jonction avec le Pays nantais, où les prairies alluvionnaires vouées à l’engraissement des bovins et à l’agriculture côtoient de manière spectaculaire les aménagements portuaires de la ville de Saint-Nazaire (totalement reconstruite à l’issue de la Seconde Guerre mondiale) ; à l’intérieur des terres, le Pays métayer liant les communes à l’activité agricole (cultures, élevage) ; au centre-est, enfin, le Pays briéron, autour de la Grande Brière, qui constitue un monde à part, replié sur ses traditions (voir ci-après).
Guérande, splendide « Carcassonne bretonne » enclose entre ses remparts médiévaux, ne lasse de susciter l’admiration des touristes, déambulant dans son lacis de ruelles et places, égayées de boutiques, de restaurants proposant de magnifiques plateaux de fruits de mer (tourteaux, étrilles, araignées, palourdes…).
Gastronomie
Comme il se doit, les spécialités locales sont tournées vers l’Océan : huître, moule de bouchot (crue, cuite ou farcie), coque du Croisic, bernique (appelé « chapeau chinois »), bouquet du Croisic (crevette1 rose), sardine (fumée, grillée, soupe de sardine) et anchois de La Turballe (mariné à l’huile), soupe au congre2, poissons de l’estuaire (lamproie marine3, saumon…), salicorne.
Autres productions et spécialités du terroir : sel de mer de Guérande, bar en croûte de sel, godaille et cotriade2, gibiers de Brière (canard, anguille).
Dans les terres, l’influence de Nantes se ressent dans la cuisine : lard nantais, filet de sandre rôti au beurre blanc, brochet au beurre blanc, alose farcie à l’oseille, saumon de Loire à l’oseille, civelles en omelette, légumes (carotte nantaise), galette de blé noir et crêpe, galette de Saint-Guénolé.
Douceur : caramel au beurre salé de Guérande.
Boissons : Jus de pomme, cidre.
Grande Brière (micro pays de la presqu’île de Guérande)
Deuxième marais français derrière la Camargue, la Grande Brière3 déploie une immense prairie tourbeuse (ancien golfe marin comblé par les alluvions), drainée par deux canaux principaux et quadrillée par des dizaines de kilomètres de chenaux poissonneux (carpes, brèmes, tanches, brochets, sandres, perches, anguilles) sur lesquels glissent des barques plates dites « chalands ». Leurs rives abritent un biotope luxuriant, où la nature déploie tous ses artifices : roseaux, iris, saules, nénuphars, oies et canards domestiques, batraciens, insectes… Et les « piardes » (terrains bas inondés) livrent refuge aux oiseaux migrateurs : oies sauvages, colverts, sarcelles, hérons… Sur les levées de terre, ou « îles », les occupants des hameaux aux chaumières trapues coiffées de toits de roseaux continuent d’exploiter ce territoire mi-terrestre, mi-aquatique, comme en témoignent les potagers minuscules, les carrelets (filets de pêche) suspendus au bout de leur perche, les cabanes servant à entreposer le matériel de chasse ou de pêche, ou encore quelques troupeaux de moutons et de vaches paissant sur des prés salés… Les Briérons restent ainsi très attachés à leurs grands horizons enveloppés de silence, et perpétuent de nombreuses traditions populaires.
Productions locales emblématiques : anguille (appelée localement « pimpenau »), grenouille (grenouilles à la crème, cuisses de grenouille à la maraîchine), gibier (canards, sarcelles, oies, lapins…), tourton.
1 Crevette, voir région Poitou-Charentes.
2 Voir à région Bretagne.
3 Nous parlons bien ici de la Grande Brière centrale (20 000 hectares), située au centre-est de la presqu’île guérandaise, se fondant avec la Grande Brière mottière (près de 7 000 hectares à elle seule), et non du terme générique de « Brière » qui tend, d’ailleurs, à se confondre avec le parc naturel régional du même nom et qui englobe d’autres secteurs pour une superficie de 40 000 hectares.
3 Généralités sur la lamproie marine, voir à lamproie à la bordelaise (région Aquitaine).
Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.
A propos du membre
Frédéric Zégierman
Valence (26000)Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.