Héritier de celle qui fut la plus petite province du royaume de France, le pays d’Aunis en reprend le nom et la majorité des frontières historiques. Cette plaine calcaire sédimentaire se fond au nord, dans la féerie des espaces mi-aquatiques et mi-terrestres, du Marais poitevin. Elle s’étend, au sud et à l’est, en de molles campagnes agricoles vouées aux cultures et à l’élevage laitier qui trouvent leur parfaite illustration dans la région de Surgères. A l’ouest, les falaises calcaires de la Côte d’Aunis se colorent de l’ocre de couchers de soleil somptueux et se prolongent par l’île de Ré. A mesure que l’on descend en direction de la côte rochefortaise, les falaises s’abaissent, le littoral se découpe de criques et de plages sablonneuses.
La Rochelle, Capitale de l’Aunis, cité rebelle au passé tumultueux, cultive un art de vivre à la hauteur de son harmonie architecturale : tours fortifiées donnant accès au Vieux Port et au Gabut (ancien quartier de pêcheurs aux maisons en bois colorées) et écrin de remparts enfermant des kilomètres de rues pittoresques bordées d’arcades sous lesquelles il fait bon flâner aux jours de crachin.
L’on y déguste le meilleur de la gastronomie aunisienne qui brille surtout par ses produits marins : la salicorne, au vinaigre ou cuite en légume, la divine mouclade, la soupe de moules (mêlant du poisson dont du congre), les moules farcies, gratinées ou à la marinière, préparées avec la moule de bouchot, le pétoncle et les clams, les poissons : mulet (muge au four), thon blanc, maigre, bar, sardine, anchois, sprat, tacaud, anguille, civelle, la chaudrée : avec du céteau, du casseron (casserons sautés), du raiteau (raiteaux en friture), les plateaux de fruits de mer que l’on admire aux terrasses des restaurants, composés selon les arrivages de tourteaux, araignées, palourdes, praires, coques (« sourdons » en patois charentais), bigorneaux, huîtres de Marennes-Oléron1, langoustines bouquets de crevettes grises (crevette), accompagnés de l’onctueux beurre de Surgères (beurre « Charentes-Poitou »).
Parmi les autres productions et spécialités de l’Aunis on rencontre, le petit pois, la mojette (provenant du Marais poitevin, ainsi qu’à l’est de l’Aunis, vers la vallée du Mignon et autour de Surgères), l’oignon rouge pâle de Niort, l’œuf de Marans, le gigot de pré-salé (moutons et agneaux autour d’Esnandes), le civet d’Aunis (fressure poitevine et gigouri), la fricassée de volailles, la sauce de lavignons, la sauce aux lumas, le farci charentais (voisin du farci poitevin), l’embeurrée de chou, le pain de porée, la jonchée, le tricorne et la Pigouille2, le gâteau de Surgères (galette charentaise), la merveille, le millas charentais, sans omettre de signaler quelques fins chocolats et autres douceurs locales aux vitrines des artisans-pâtissiers.
L’Ile de Ré
Trait de terre de 25 kilomètres de long, constitué à l’origine de trois îlots, L’île est reliée au continent par un pont depuis 1988. Ré « la Blanche » doit son nom à la déesse Rhéa (épouse de Cronos et mère de Zeus dans le panthéon grec) et son surnom à ses coquettes maisons basses aux murs blanchis, à son sable clair, à l’écume des vagues et au sel que l’on y produit. Cette luminosité exceptionnelle, couplée à un climat azuréen, en fait un paradis du tourisme avec ses conséquences aberrantes sur le prix de l’immobilier !
Pourtant, si la pression démographique y atteint des pics l’été, l’île a su préserver ses landes sauvages et son économie d’antan. Ostréiculture, aquaculture, agriculture (primeurs, orge, vin) y perdurent, de même que les marais salants. Quant aux oiseaux migrateurs, ils y stationnent toujours par colonies entières. Saint-Martin, délicieuse villégiature enserrant son petit port de pêche, en est la capitale.
Quelques productions rhétaises : pomme de terre de l’île de Ré, asperges, sel marin de l’île de Ré, salicorne, huîtres dites « pied de cheval », moule de bouchot, pétoncle, poissons (céteau), galette charentaise, sablés et croquants, pralinés, chocolats, patate de Ré. Et, plus inattendu, un vin rouge.
1 On trouve une production locale, au nord de La Rochelle, dite de Nieul-sur-Mer, localisée essentiellement au village de Lauzières, dans d’anciens marais devenus claires pour l’affinage.
2 Pigouille et tricorne, deux fromages originellement fabriqués au nord de l’Aunis, dans le Marais poitevin, mais dont la fabrication (quasi confidentielle) peut être le fait de producteurs-fermiers basés dans d’autres pays.
Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.
A propos du membre
Frédéric Zégierman
Valence (26000)
Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.
